26 janvier 2024 - 1714 vues
Monsieur le Ministre,
Le Lot-et-Garonne comme ses départements voisins sont le théâtre depuis lundi 22 janvier 2024 du cri de colère des agriculteurs. Des bâtiments publics et des enseignes de la grande distribution
ont été pris pour cible par le syndicalisme agricole, à plusieurs reprises. Les manifestants ont également bloqué les voies de circulation de l'autoroute A 62 dans sa section en Lot-et-Garonne,
provoquant de très importantes difficultés de circulation pour les personnes et les biens entre
Toulouse et Bordeaux. Je ne peux que vous exprimer mon inquiétude face à cette vive montée de la colère des « paysans». Dans le Sud-Ouest, le Lot-et-Garonne est l'un des foyers qui nourrit cette colère
sourde depuis dix ans, qui explose aujourd'hui. Avec leurs propres méthodes de revendications, les agriculteurs expriment ainsi le malaise profond qui est le leur. Il n'est pas récent, mais il
atteint en ce début 2024 son paroxysme.
Ces manifestations ne sont pas sans précédents dans l'histoire de la contestation au sein du monde agricole. Cette fois, la plaie est béante, et ne peut se refermer qu'avec des solutions pérennes,
durables pour le métier d'agriculteur. Il ne me revient pas le droit d'émettre un avis sur le mode d'expression syndicale de ces agriculteurs et vous l'avez dit vous-même, il faut éviter la
surenchère et les amalgames. Je sais par ailleurs que vos expériences passées vous ont permis d'approcher le monde agricole au plus près des besoins et des nécessités de ces ouvriers de la
terre. Ces rassemblements ont toutefois un point commun : l'expression d'une défiance et d'un sentiment
d'incompréhension des exploitants agricoles face à l'absence de décisions des pouvoirs publics pour
leurs revendications. Le Conseil départemental de Lot-et-Garonne est en prise directe avec l'expression de cette colère
du monde rural. Couramment qualifié de« Jardin de la France», notre département est riche de plus
de 70 filières différentes, leader pour la production de kiwis, de fraises, de tomates et de semences. La réputation de l'agriculture de Lot-et-Garonne n'est plus à faire, le Conseil
départemental en fait chaque année une vitrine de son savoir-faire lors du Salon International de L'Agriculture de Paris, comme ce sera encore le cas le mois prochain. Et c'est avec grand plaisir qu'une rencontre pourrait être organisée sur notre stand lors de la journée Lot-et-Garonne, le jeudi 28 février. La colère qui s'exprime pose la question du rôle des collectivités locales dans l'aide et le soutien au monde agricole. Comme l'affirme très justement l'Assemblée des Départements de France par la voix de son président François Sauvadet, « l'agriculteur français peine à entrevoir des solutions durables à l'ébranlement de son modèle économique». Pourtant, il existe des moyens. Nous les expérimentons de longue date en Lot-et-Garonne en adaptant en permanence nos régimes d'aide pour coller au plus près des réalités du terrain, en dépit des contraintes imposées par la loi NOTRe. L'agriculture doit certes s'adapter mais les agriculteurs doivent être assurés d'être accompagnés.
Par ailleurs, les perspectives que le pays tout entier doit à celles et ceux qui nous nourrissent ne peuvent s'envisager durablement, dans une économie devenue mondiale, qu'au plan national et européen. Non, les productions agricoles ne sont pas des produits comme les autres. Faisons réellement de l'agriculture une exception, qui ne soit pas contrainte de s'aligner sur un marché concurrentiel où le moins cher l'emporte toujours.
Je ne doute pas, Monsieur le Ministre, que vous apportiez une réponse aux agriculteurs Lot-et-Garonnais. Ils attendent de vous des solutions concrètes et pérennes.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération.
Sophie BORDERIE
Présidente du Conseil départemental
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