14 novembre 2023 - 2068 vues
Les violences contre les femmes relèvent d’un système sur lequel repose notre société patriarcale.
Celle-ci fonctionne toute entière sur des mécanismes de violences machistes, totalement acceptés, souvent invisibilisés. Ces violences sont de tous ordres et les féminicides ne sont pas des actes isolés :
ils s’inscrivent dans le continuum des violences faites aux femmes. Il est dans l'intérêt du système patriarcal de maintenir les femmes sous contrôle des hommes, qui les ont décrétées inférieures, mais requises au travail reproductif. En France, les gouvernements du président Macron ont fait de la lutte contre les violences faites aux femmes la grande cause des deux quinquennats. Grande cause nationale ou effet d’annonce ? Qu’en est-il réellement ? Des violences toujours impunies en France Les faits sont têtus: plus de 3 millions de femmes déclarent des violences sexistes et sexuelles chaque
année et les forces de sécurité en enregistrent près de 200 000. Ces chiffres suivent une tendance
vertigineuse : +83% pour les violences conjugales entre 2018 et 2022 et +100% pour les violences sexuelles ces 10 dernières années, dont +33% entre 2020 et 2021.
Seules 10 % des victimes de viol portent plainte, et la justice ne condamne que très peu ces crimes. Ainsi seulement 1 % des viols déclarés sont sanctionnés aux Assises. Soit 99 % des violeurs peuvent
tabler sur leur impunité.
Au 02 octobre 2023 : 97 féminicides depuis le début de l’année. 1 féminicide tous les 2,8 jours. Peut-on parler de diminution quand on sait que les chiffres de 2022 (118) et 2021 (122)
correspondaient à 1 féminicide tous les 3 jours et étaient en augmentation de 20% par rapport à 2020 ? Il n'est donc pas question de diminution mais bien d'augmentation si nous continuons à ce
rythme en 2023. À noter que les suicides suite aux violences ne sont pas comptabilisés !
En outre, le rapport annuel 2023 du Haut Conseil à l’Égalité fait état d'une aggravation des injures
et violences sexistes envers les femmes et les personnes LGBTQI+. La parole réactionnaire se
banalise dans les médias et encourage les actes violents.
Le bonheur est-il dans le Gers ?
Deux féminicides ont été commis dans notre département dans les 4 dernières années. Le dernier a
eu lieu à Préchac-sur-Adour le 3 août 2023.
Pour l’année 2022, 459 faits de violences intrafamiliales (VIF) en direction des femmes et des
mineurs ont été recensés par la gendarmerie du Gers. Les types de violences sont d'abord
physique, puis sexuelle et psychologique. 349 femmes sont recensées dans les victimes et 147
mineurs. 39,2 % ont un lien conjugal avec leur agresseur et 19 % un ex-lien conjugal avec l'auteur
des faits. La tranche d'âge la plus touchée est de 30 à 49 ans avec 158 faits recensés. Et ces chiffres
sont loin de représenter la totalité des violences vécues sur le département puisque la plupart des
femmes ne dénoncent pas les violences qu’elles subissent.
L’outil numérique, solution ou piège ?
Certaines femmes se sont saisies des outils numériques (par exemple via le mouvement #MeToo,
popularisé mondialement en 2017). Cela leur a permis de faire entendre leur voix au-delà de la sphère familiale, de sortir de l’isolement, de faire connaître leurs luttes au-delà de leur pays (Iran, Tunisie…).
Mais ces outils déploient la même capacité de diffusion quand ils sont utilisés contre elles : le cyberharcèlement fait des ravages, ce qui nécessite d’urgence un grand plan de lutte.
En effet selon un sondage IPSOS, 85 % des personnes LGBTQI+, 71 % des personnes racisées et 65 % des femmes de moins de 35 ans ont déjà subi du cyber-harcèlement.
Où est l’argent contre les violences faites aux femmes ?
Depuis le Grenelle, le budget dépensé par l’État pour chaque femme victime de violence a baissé
de plus de 25% du fait de l’augmentation des besoins. Le Haut Conseil à l’Egalité, en 2020 estimait les besoins en places d’hébergement d’urgence, non mixtes et sécurisées, à 20 000. Fin 2022, on
dénombre 10 144 places. Les associations qui œuvrent au service des femmes contre ces violences, ces structures spécialisées,
qui font un travail d’accueil d’urgence et un travail au long cours auprès des femmes violentées, dénoncent la faiblesse de leurs moyens et les grandes difficultés où elles se trouvent :
budgets insuffisants, violence psychique pour le personnel mis en situation d’impuissance à faire son travail auprès des femmes et des enfants. Des associations ont dû fermer des lits au cours de l’été
2023, notamment à Toulouse, 33 places. En Essonne, pour être mises à l’abri plus de deux semaines, les femmes doivent déposer plainte, ce que la loi n'exige pas.
Ces structures demandent un cadre politique et une augmentation du budget (centres d’aide d’urgence,
cellules de signalement de harcèlement sexuel, prise en charge spécialisée en psycho-traumatisme).
Elles demandent le renforcement de la chaîne des acteurs de sécurité et de justice (enquêteurs.trices et magistrats.tes spécialisés.es dans les faits de violences sexistes et sexuelles).
Qu'attend la France pour suivre l'exemple de pays comme l'Espagne qui ont réussi à baisser considérablement le nombre de féminicides par des politiques publiques efficaces?
L’école, égalité des chances ou lieu de discrimination ? En cette rentrée scolaire 2023, le gouvernement a trouvé urgent de relancer l’instrumentalisation en
interdisant le port des abayas, ce qui stigmatise encore les jeunes filles par leur tenue et risque d'avoir comme conséquence l'éloignement pur et simple d'une partie de filles de l'école publique.
Nous, collectif de femmes, demandons à ce qu’il y ait une véritable éducation à l’égalité de genre en milieu scolaire afin de lutter contre les facteurs d’ordre culturel, les stéréotypes et préjugés fondés
sur le genre et les attentes normatives à l’égard de la féminité et de la masculinité. Une précarisation accrue pour les femmes Le gouvernement décide de conditionner le RSA à 15h d’activité hebdomadaire, ce qui constitue une violence supplémentaire à l’égard des femmes, plus nombreuses à percevoir le RSA. En effet, elles représentent 96 % des personnes seules avec enfants à charge.
Les conditions de vie matérielle des femmes leur interdisent bien trop souvent de fuir leurs agresseurs : la précarité du travail avec ses bas salaires, la cherté des loyers, des charges de logement,
de l’alimentation, rendent très difficile et angoissant un départ. Bien souvent ces femmes ont des enfants à éduquer. Comment vit-on avec un RSA, un salaire précaire, un père qui ne paie que trop
rarement une pension alimentaire trop faible ? Et pourquoi sont-ce les femmes, victimes de ces violences, qui doivent en plus assumer un
déménagement, un éloignement de leur lieu de travail, des lieux de scolarisation des enfants, un éloignement des relations amicales, familiales... ?
Les femmes premières victimes de la violence économique Le développement d’un discours réactionnaire est un point d’appui pour justifier l’assignation au
travail reproductif. Et ce discours réactionnaire favorise et légitime les violences sexistes. Une fois encore, on voit que les questions économiques et les questions des violences sont corrélées.
Les revendications d’ordre économique sont importantes dans la lutte contre les violences, notamment la revendication de l’égalité salariale. À une échelle plus globale, on constate que depuis 2008, un
des effets de la crise économique et des politiques d’austérité qui en ont découlé a été une gigantesque destruction des services publics, qui avaient pris en charge une partie importante du travail dit «
reproductif » : celui de la santé, de l’éducation… Au niveau international en temps de guerre Les mécanismes du patriarcat aggravent beaucoup les conditions des femmes : dans les conflits
elles sont délibérément ciblées comme objectifs de guerre. 80% des victimes des conflits sont des femmes et des enfants. Elles sont en première ligne dans les déplacements, se voyant confier la sécurité des enfants et leur survie. Les viols et les agressions sexuelles sont largement utilisés contre elles. Quand elles sont faites prisonnières les mêmes traitements sont utilisés comme moyen de torture. Face à ces exactions trop peu d’organismes internationaux se penchent sérieusement sur ces problèmes.
Partout et dans toutes les situations, « en guerre » ou « à l’abri », les femmes restent victimes de violences constantes et considérables, méprisées, humiliées, violées, tuées.
C’est pourquoi, dans toutes les situations, les femmes doivent s’unir pour lutter contre toutes les violences et crier haut et fort « une autre façon de vivre est possible, une autre société est
possible »
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