L’intervention de Sophie Borderie, lors des Etats généraux du massif des Landes de Gascogne hier soir


25 novembre 2022 - 2593 vues

L’intervention de Sophie Borderie, lors des Etats généraux du massif des Landes de Gascogne hier soir, aux côtés des présidents des Départements de la Gironde et des Landes, Jean-Luc Gleyzes et Xavier Fortinon, en présence du Ministre Marc Fesneau.

Mme la Préfète de Région, Mesdames et Messieurs les élus, responsables de structures, établissements et services de l’Etat Notre réunion d’aujourd’hui est essentielle.

Les « méga-feux » de l’été dernier ont représenté un véritable électrochoc. Il y aura, et il doit y avoir, un « avant » et un « après » été 2022 en matière de sécurité civile. Il y a en effet urgence : nous ne pourrons pas dire, plus dire, que nous ne savions pas ou que nous n’étions pas prêts. Les chiffres ont été rappelé, au niveau national, au 31 août, plus de 8 550 incendies ont été recensés pour une surface brûlée proche de 70 000 hectares. Le bilan 2022 est ainsi 2,3 fois supérieur en nombre de feux, et 6 fois supérieur en termes de superficie brûlée par rapport à la moyenne décennale. Le Lot-et-Garonne, où le massif forestier des Landes de Gascogne représente près de 60 000 hectares, a dû faire face à 496 départs de feux enregistrés entre le 1 juin et le 30 septembre, soit une hausse de 334 % par rapport aux années précédentes. Si cet été a été « exceptionnel », il est malheureusement probable, compte tenu de l'intensification et de l'extension géographique du risque feux de forêts induit par le réchauffement climatique, que la saison des feux 2022 devienne à l'avenir une saison de référence. Il nous faut ainsi être prêt à la fin du premier trimestre prochain pour aborder non plus l’été, mais, du fait de la précocité climatique, le printemps qui vient.

C’est tout l’enjeu de cette réunion. Les solutions ou mesures pour faire face au développement inévitable du risque des feux de forêts sont en grande partie connus, plusieurs ont été évoqués cet après-midi ; Ils sont tout à la fois le résultat d’une expérience réelle et parfois centenaire de gestion des risques, renforcés par un développement constant des techniques et technologies dont nous disposons aujourd’hui. Si nous voulons gagner, ensemble, cette « bataille du feu », deux conditions sont nécessaires : - Premièrement, du courage, une volonté politique forte et assumée et la mobilisation de tous. Des mesures doivent être prises, dont certaines viendront peut-être bousculer des habitudes, froisser des lobbies. Nous ne devons et pouvons trembler, nous devons convaincre, accompagner, associer, concerter mais, s’il le faut et le moment venu, imposer .

Deuxièmement, des moyens. Nous devons faire de la lutte contre les incendies une cause nationale et l’Etat doit dégager, enfin et rapidement, les moyens nécessaires pour permettre à l’ensemble des acteurs concernés, notamment les SDIS, d’assumer avec efficacité leurs missions. Les feux de cet été ont illustré tout à la fois la capacité de résilience mais aussi les limite de notre modèle de protection civile. Il convient de rappeler que le financement de la sécurité civile repose essentiellement sur les dépenses locales. Le budget consolidé des services départementaux d'incendie et de secours s’élevait en 2021 à 5,7 milliards d'euros, dont 2/3 financé par les collectivités territoriales, et notamment par les Départements. Or nous le constatons tous, la multiplication du nombre de feux, mais également leur intensité et la mise en place de la doctrine de réponse « vite et fort » dès le premier départ de feu, nécessitent un renforcement massif des moyens disponibles, en hommes et en matériel. Le Président de la République a annoncé le déblocage d’une enveloppe spéciale de 400 M€, - 150 millions d'€ pour les services de secours à travers un "pacte de programmation de défense locale" destiné notamment à compenser le cout du matériel détruit ou endommagé cet été, - 250 millions d'€ pour un réarmement aérien d'urgence.

C’est une première étape qu’il faut saluer, mais ces moyens dégagés ne sont clairement pas à la hauteur des enjeux et des défis à venir ! A titre d’exemple, les SDIS disposent seulement de 3 700 camion-citerne feux de forêt sur l’ensemble du territoire national, alors qu’il en faudrait 10 000 selon la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France. Pour mémoire, le cout unitaire de ces équipements est estimé à 200 000€. De même, la fédération estime à 250 000 sapeurs-pompiers volontaires et 50 000 sapeurs-pompiers professionnels le nombre de pompiers nécessaires pour apporter une réponse opérationnelle à la hauteur des enjeux à l’horizon 2027. Plusieurs propositions ont été avancées pour enfin donner aux SDIS les moyens financiers dont ils ont besoin et favoriser le recrutement de nouveaux effectifs.

Augmentation de la part de TSCA attribuée aux départements par un rééquilibrage entre les différents bénéficiaires sans forcément de hausses d’impôts - Exonération du malus écologique à l’achat de véhicules - Exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques .

  • - Exonération fiscale ou sociale pour les employeurs de sapeurs-pompiers volontaires et/ou complément de la subrogation versée à l’employeur. Il convient de les examiner rapidement. Oui, les moyens supplémentaires nécessaires ont un cout certain, mais ils doivent être rapportés à la « valeur du sauvé ». En ce qui concerne plus particulièrement le massif forestier des Landes de Gascogne, nous proposons que ce massif devienne un « territoire pilote » face aux risques feux de forêt mais également aux risques climatiques. Nous proposons également que soit pré-positionnées sur nos territoires durant la période critique des forces d’intervention aériennes qui pourront ainsi rayonner sur l’ensemble du SudOuest. La multiplication de « pélicandromes » ou de points de ravitaillement sont intéressants, mais ils ne sont pas suffisants.

  • Nous demandons également la création d’une unité d’intervention de la sécurité civile dans la région du massif des Landes de Gascogne. Ces renforcements par l’Etat des moyens des SDIS des territoires des Landes de Gascogne mais plus globalement des SDIS de France est une urgence absolue; La sécurité civile ne pourra continuer à être financée essentiellement par les collectivités et acteurs locaux ! Les Présidentes et Présidents de SDIS sont tous en train de préparer leur budget 2023 et en leur nom je tire aujourd’hui publiquement la sonnette d’alarme. De nombreux SDIS se trouvent aujourd’hui dans l’obligation d’envisager d’augmenter les contributions des Départements et du bloc communal de plus de 10% pour uniquement faire face à l’explosion du cout de l’énergie et du carburant ! Il est à ce titre indispensable que les SDIS puissent bénéficier d’un bouclier tarifaire au regard de leurs missions, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui ! Je conclurai en citant mon collègue et ami Jean-Luc Gleyze : « Il n’est pas acceptable que notre massif, patrimoine forestier commun venu des générations antérieures soit parti en fumée pour rien. » C’est notre responsabilité, c’est notre devoir.

    Je vous remercie

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